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Le 18 Janvier 1943, à 4 heures de
l'après-midi, plusieurs Inspecteurs de la Police Spéciale se présentèrent au n° 18 de la rue Delphin
Loche à Bègles, mon domicile, pour m'arrêter. fis commencèrent par m'interroger ainsi que ma famille
et me fouillèrent. Ils trouvèrent dans mes poches des bulletins de bagages à sortir de la gare Saint-Jean
et aussitôt ils me mirent les menottes et commencèrent une perquisition qui ne donna aucun résultat.
En fin de compte, je fus embarqué dans une voiture et de là, amené au bureau spécial de la rue Victoire-Américaine
où je fis la connaissance du chef de la sûreté, un nommé POINSOT (1) qui, à peine arrivé, commença à me
frapper et à m'accuser d'un crime commis à la Bastide la semaine passée sur un individu qui avait
vendu des camarades à la Gestapo. Aussitôt, je lui ai ri au nez, ce qui m'a valu une correction.
Heureusement pour moi, 2 Allemands se présentèrent avec le soi-disant meurtrier et le soir, vers 7 heures,
je suis conduit en voiture cellulaire à l'annexe du Fort du Hâ, Caserne Boudet, rue de Pessac, où je
fus de nouveau fouillé. Ils ne me laissèrent qu'une photo de mes enfants et je fus jeté dans une cellule
avec une boule de pain. ils m'y laissèrent plusieurs semaines tout seul, sans aucun interrogatoire,
sans pouvoir me raser ni me laver complètement.
Enfin, un jour, je suis conduit devant ces Messieurs de la Police Française, ou soi-disant française,
où ils recommencèrent à me questionner sur tout ce que j'avais fait avant mon arrestation. ils en
furent pour leur frais, ce qui me valait de temps en temps une correction avec coup de poings dans
l'estomac, coups de pieds, gifles, etc... enfin toute la gamme du répertoire de ces messieurs et on
peut dire qu'ils connaissaient leur métier à fond.
Enfin, ils firent un dossier à mon nom, en règle avec comme en tête « Activité illégale communiste »,
juste de quoi recevoir 12 balles dans la peau. Je signe et suis reconduit dans une cellule où il y
avait déjà des camarades qui avaient à peu prés le même motif que moi, des jeunes gens qui avaient
voulu passer la frontière pour aller se battre en Afrique où pour ne pas aller travailler en Allemagne,
car tous ceux qui n'étaient pas nazi ou hitlérien étaient considéré comme des bandits et jugés comme
tels. Nous étions nourris comme des cochons: soupe infecte, il y avait au fond des gamelles au moins
2 centimètres de terre avec des racines et de l’herbe. De temps en temps, le dimanche, nous recevions
un petit paquet envoyé par une Société Religieuse nommée les Quakers, dont le siège est à Bordeaux,
rue Darnal.
(1) En réalité chef de la Section des Affaires Politiques.