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45 ans après. |
Face aux rumeurs. |
Jugement administratif |
Documents de travail |
Une commune comme tant d’autres. Nichée au fond du monde rural, elle cadence sa vie au rythme des saisons. En 1939, la mobilisation
générale y venait prélever son lot de militaires; certains revinrent, d’aucuns périrent, d’autres furent prisonniers.
Sensibles au « retour à la terre » prôné par le Maréchal, nombreux étaient les pétainistes. La proximité de la ligne de démarcation
accommodait les plus hardis; la prise de quelques risques pouvait apporter de réels bénéfices. Trois options possibles se présentaient
à chacun. La première, la plus simple, consistait à courber l’échine, à subir l’occupant et le joug imposé et à survivre; d’autres,
acceptant la politique de collaboration et les avantages qu’elle pouvait offrir, se rapprochaient de l’occupant. Et puis, peu nombreux,
étaient les « Résistants », s’opposant à Vichy, bien sûr, mais avant tout à l’envahisseur, aux souffrances endurées, aux morts
inutiles et barbares. Il y avait ceux qui se refusaient à déposer les armes, puis les « politiques » devenus clandestins, recherchés
par la police française comme par la police allemande, les révoltés avides de liberté, qui ne pouvaient accepter l’occupation,
enfin, en 1943, l’application de la loi instaurant le Service du Travail Obligatoire, ordonnée avec l’accord du gouvernement de
Vichy, fit se réfugier vers les maquis les jeunes de vingt ans réfractaires au départ vers l’Allemagne. Tous ces hommes se mettaient
hors la loi, bien qu’agissant en héros, sans le savoir et sans calcul.
Cet ensemble devait former les Forces Françaises de l’Intérieur; mais il fallait l’armer, l’approvisionner, le mettre en place.
Le gouvernement de Londres, grâce aux Alliés, allait fournir des armes, insuffisamment et de manière sélective puisque les F.T.P.,
soupçonnés d’œuvrer pour le Parti Communiste, se voyaient tenus à l’écart des approvisionnements. Londres fournissait le plus souvent
l’argent indispensable. Mais les clandestins, les maquisards, devaient assurer la vie de tous les jours, la nourriture, les vêtements
aussi bien que le tabac nécessaire au moral fragile de ces hommes. Il fallait franchir de nouveaux degrés dans l’illégalité. On
attaquait les mairies pour voler des cartes de rationnement, souvent avec l’accord des employés municipaux; des bureaux de tabac
étaient dévalisés, des provisions prélevées chez les paysans dans les campagnes, parfois un mouton, un veau… Cela se concrétisait
souvent par l’émission d’un « bon à payer », libellé au nom des F.F.I. Certains, dans les campagnes, acceptaient ces actions, tout
simplement par patriotisme. Malheureusement la règle n’était pas générale et nombreuses victimes se plaignaient de vol, de brigandage,
et acceptaient le jeu de l’occupant en les traitant de « terroristes », de « brigands » et de « voleurs ». Bien sûr, il y eut des
brebis galeuses, des exactions, des excès… Sous le couvert de la Résistance se glissèrent des chefs de bandes, des condottières,
des faux maquis qui pratiquaient le vol comme l’assassinat. On ne peut généraliser pour autant et assimiler à la Résistance ces
regrettables débordements. L’année 1944 fut une année charnière; la Corse venait de se libérer, les troupes alliées se trouvaient
au mont Cassino, en Italie. Sur le front de l’Est, l’armée allemande entamait sa retraite. L’heure du débarquement en Normandie
approchait. Les passions s’exacerbaient; la Milice abattait Victor Basch, ancien Président de la Ligue des droits de l’homme et
sa femme. Missak Manouchian et ses hommes étaient exécutés et le plateau des Glières attaqué, avec l’aide de la Milice. De son
côté, la Résistance harcelait les troupes d’occupation et les collaborateurs notoires. Certains étaient menacés, d’autres exécutés.
Il semble même que des profiteurs reconnus aient été mis à l’amende. Mais que se passait-il à Saint Philippe d’Aiguille ?