Biographie.
Résistants honorés.
Tramasset Edgard Mathieu




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Témoignage de Pierre Tramasset.

Témoignage de
René Tramasset.
Témoignage de
Pierre Tramasset.



Fin novembre 1940, une centaine de responsables syndicalistes et communistes sont arrêtés et sont enfermés au camp d’internement, quai de Bacalan.

Suite à un ordre de grève de cinq minutes, en novembre 1941, donné par la radio de Londres, à la S.N.C.A.S.O, dans un atelier désert, un ouvrier reste à son poste pour prélever un minuscule morceau d’un nouvel alliage utilisé et qui intéresse les Alliés. Cet homme sera considéré comme un traître par ses camarades qui ne connaîtront son acte héroïque que bien plus tard. Aux Aciéries de Longwy, l’arrêt de travail aura spontanément, sans consigne. Le personnel se trouva réuni, au milieu de la cour, sans aucune parole, étonné et surpris de se trouver là.

En 1941, la centrale électrique de Pessac alimentait le secteur industriel et plus particulièrement la base sous-marine. La centrale fut sabotée; son explosion arrêta les travaux sur la base pendant plusieurs semaines.

En 1942, plusieurs ouvriers sont arrêtés à la S.N.C.A.S.O. certains d’entre eux furent fusillés le 21 septembre 1942, à Souge.

La base sous-marine est définitivement construite en 1943 grâce à la main d’œuvre de prisonniers nord-africains, d’ouvriers espagnols et français. Dans ces derniers, beaucoup venaient de la campagne. Ils essayaient ainsi d’échapper au S.T.O. en se faisant employer par l’organisation Todt (travail, entre parenthèse, ne comptant pas pour le décompte de la Retraite).

Ces gens travaillaient jour et nuit car le travail était énorme. Il faut savoir que cette construction comprenait 11 alvéoles de 700.000 m3 de béton, avec un toit d’une épaisseur de 6 mètres. L’U-bunker abritait les U-boots allemands et les sous-marins italiens. Bordeaux Bacalan, avec tous les bâtiments de guerre de surface, était une des plus importantes bases militaires maritimes et sous-marines du IIIème Reich en France. La Kriegsmarine construisit pour son personnel militaire et civil des ensembles d’habitations. Cette implantation partait du château Blondeau, propriété entouré de nombreux pâturages où, dans un premier temps, furent installés des canons de D.C.A.

Cette enclave était délimitée par la cité Lafon, le chemin Lafitte, le chemin Labarde, et le chemin de la Palu. Tout cela, après la guerre permit d’aménager la cité Claveau.

A partir de 1940, des travailleurs venant de l’Est de la France, notamment de Longwy, vinrent embaucher aux Aciéries de Longwy, au 110 rue Achard. Il fallut héberger ces arrivants, pour cela des baraquements furent construits rue de New-York. De plus, certains furent logés dans des habitations (cité Pourman, rue Charlevois de Villers…), d’autres seront dirigés vers des centres forestiers. Pour ceux-là, il s’agissait d’échapper à la déportation, puisque, bien que requis sur place dans cette usine fabricant des obus de 75 et de 155, leur situation se fragilisait du fait du démantèlement de la fabrication. Tout devait partir en Allemagne ; les tours, les machines outils, les transformateurs, les réservoirs d’huile spéciale, le matériel neuf…

Le pillage a duré deux ans. J’ai chargé personnellement des obus sur des wagons, sous la surveillance de vieux soldats allemands portant l’uniforme de l’organisation Todt. L’un d’eux me dit un jour:

" La guerre, un grand malheur ! Berlin, boum-boum, famille là-bas. »

Tout le long de la Garonne, de grandes portes en fer empêchaient tout approche de la rive. Cela, pour éviter que nous ayons la tentation de jeter les obus de 75 dans la Garonne.

Le 17 mai 1943, l’aviation américaine bombardait la base sous-marine. Il était midi, sous un ciel bleu magnifique, mon père et moi étions à la cantine de l’entreprise. La sirène, des explosions, des avions que l’on distingue à très haute altitude; plus de cent morts parmi la population civile, surtout après les ponts tournants, le cours Edouard Vaillant et aussi le boulevard de Brandeburg où se trouvait l’usine en construction de Matford, située à côté de l’usine d’aviation. On releva quelques victimes italiennes et allemandes mais la base sous marine était intacte. »

Peter Krause, dans son livre « Les bombardements de Bordeaux », note que si le U-Bunker, privé d’électricité, n’accuse que la destruction de certaines poutrelles, il n’en est pas de même côté italien qui a subi de graves dommages. Quais, entrepôts, hangars et quelques barges ont été détruits. Les dégâts provoqués à l’une des écluses et au pont tournant sont plus préoccupants. Le bassin au niveau de la Garonne s’est vidé dans le fleuve faisant éclater les quais sur une longueur de 400 mètres.. L’activité maritime reste paralysée dans cet espace et les cinq sommergibili échoués sur le fond vaseux ne peuvent plus naviguer. La base sous marine de Bordeaux est paralysée. Pas pour longtemps, début juin, le problème sera réglé.

Mon père et moi, nous nous sommes réfugiés sur le parvis de l’église Saint Rémi. Mon père est effondré car il sait avoir fourni à Londres l’information de la présence d’U-Boot dans la base; cela était facile depuis les « Aciéries de Longwy ». Il me confia « Je vais signaler ce grabuge pour éviter de tels bombardements. »

Après ce drame, nous avons quitté Bordeaux avec trois familles de la cité Lafon et une de la cité Pourman pour aller habiter Langoiran et ses environs. Il est vrai que beaucoup restèrent à Bordeaux. »

Je fus obligé de revenir aux «& Aciéries de Longwy » sur injonction des autorités allemandes qui m’avait convoqué, le 25 octobre 1943, à la FeldKommandantur 529 qui siégeait dans les murs de la Bourse du Travail réquisitionnée par leurs soins. Il s’agissait, officiellement, d’une contre visite médicale. En fait, mon père ayant été arrêté le 13 octobre 1943, beaucoup de questions sur celui-ci me furent poser; son activité, parachutages, bombardements dans le quartier. Reconnu apte au travail par le médecin chef de la FeldKommandantur, soutenu par la direction des Aciéries de Longwy, j’ai repris immédiatement le travail, sur le conseil de Résistants, ce qui m’a évité, je suppose, de rejoindre mon père au fort du Hâ. Ce qui m’a le plus marqué, c’est que, la veille de son arrestation, mon père, nous réunissant ma mère et moi dans la cuisine, me dit:

- Je vais être arrêté. J’ai été dénoncé et je vais me livrer à Castres. Je voulais te faire passer en Espagne. Je ne dénoncerai personne. »

Jusqu’à la Libération je fus contraint de venir, tous les jours, aux Aciéries de Longwy, dans des conditions de trajet extrêmement pénibles, car, à ce moment-là, l’occupant coupait souvent la circulation avec les ponts tournants. Tous les jours, j’allais de Langoiran à Portets à vélo, puis de là jusqu’à Bordeaux, en train, enfin, le tramway. Il fallait passer sur des radeaux et montrer un Ausweiss. A cette époque, ils ont construits un abri en béton entre les ponts n°1 et n°2. Le train et le tram étaient souvent arrêtés pour délestage électrique. Tout ceci entraînait de nombreux retards à l’embauche, mais c’était le cas de tous les usagers. »

Tout au long de ces trajets, j’ai eu l’occasion de constater, avec effarement, l’importance du trafic qui pouvait s‘opérer sur les tickets de rationnement, et plus particulièrement sur les cartes de pain et cela avec la bienveillance de l’occupant; alors que nous manquions de tout. »

« Je rencontrais alors beaucoup de méfiance de la part de gens que je côtoyais et qui voyaient en moi, soit le fils d’un homme arrêté pour action politique, soit le fils d’un terroriste que l’affaire de Lestiac venait assombrir ».

« Si je rends, ici, hommage à mon père, je rends hommage aussi à ma mère qui est restée seule avec cinq enfants âgés de quatre ans, pour le plus jeune, et de dix-sept ans pour le plus âgé. Les revenus de ma mère étaient les allocations familiales, peu élevées du fait de l'aîné qui était immatriculé à l'assurance sociale et la paie de deux enfants.



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