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Extrait du bulletin n°12 de R.U. (mai 1990)
Le 4 septembre 1944, la compagne de Georges Mandel, Béatrice Bétry adressait la lettre suivante (dont nous publions des extraits) à un Résistant girondin.
Cher Monsieur,
Je prends un peu de courage pour vous écrire. Je me demande comment la bête fait pour vivre après
des coups pareils. Avez-vous reçu la lettre que Besselère vous a écrit de Pau pour vous raconter
les circonstances du drame? Je n'étais pas en état de le faire. On ne peut rien imaginer de plus
ignoble. Et dire qu'ils ont tous échappé au châtiment! Pas pour longtemps, j'espère. Tant que
j'aurai un souffle de vie ce sera mon unique souci. Ce sont les miliciens qui ont fait le coup,
de vulgaires tueurs, n'en laissez échapper aucun dans vos régions surtout.
Quelle perte pour la conscription! Quelle perte pour la France, quelle perte pour tout le monde.
Je suis ici avec Claude jusqu'au 15. Nous avons déménagé après les lettres mais je tenais à les
envoyer. Ensuite, nous irons à Pau chercher nos bagages et les caisses de livres d'Urdos, avant
de rentrer à Paris à la fin du mois. J'espère que rien ne s'y opposera. J'ai une tombe qui m'appelle.
(...) J'espère que dans la joie égoïste du triomphe, les successeurs n'étoufferont pas l'assassinat;
ce serait moche. En tous cas, moi je n'ai pas l'intention de le laisser oublier. Il faudra qu'il
continue de vivre et vous m'y aiderez n'est-ce pas?.
Je Je note toute l'histoire du martyrologie dont j'ai été le témoin heure par heure, vous le savez.
Si vous vous rappelez de paroles particulièrement marquantes qu'il vous aurait dites au cours des
visites que vous lui avez faites, soyez assez bon pour me les transmettre. Je ne trouve un peu
d'apaisement que lorsque je travaille pour lui.
Veuillez diffuser les lettres ci-jointes auprès de ses amis ou admirateurs.
Je ne suis qu'une femme, je n'ai pas laissé faire sans réaction et je continuerai. La petite pelletée
de terre et bonsoir, n'est pas faite pour lui. On peut rééditer, en son honneur, la parole historique:
"Encore plus grand mort que vivant".
Je compte que vous serez à mes côtés comme par le passé, et, je vous envoie, de Claude et de moi,
nos souvenirs les meilleurs et nos amitiés.
Bien tristement votre.
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Lettres de Claude Mandel |
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