La répression. Fort du Hâ. |
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Sous la botte allemande |
Cellule n°4. |
Témoignage de compagnons de cellule de Paul Mamert
Fort du Hâ allemand Cellule n°4 A la mémoire de Paul Mamert Mort pour la France martyr des bourreaux nazis. |
Chaque jour qui passe nous apporte les échos douloureux des atrocités allemandes. Les martyrs qui, par miracle, ont survécu à ce
raffinement de tortures, nous donnent des détails si poignants, si stupéfiants qu'on a peine à y croire. Aucun peuple de sauvages,
parmi les plus cruelles, ne s'est ravalé à des actes aussi barbares. Et, cependant, nous ne pouvons douter des témoignages de ceux
qui ont vécu ces heures de barbarie.
Ils sont une poignées de survivants, des centaines des mille ont succombé dans d'horribles souffrances.
Nous venons d'apprendre la mort de Paul Mamert, si honorablement connu et estimé à Bordeaux, qui, après d'infâmes tortures, a été
brûlé vif le 5 mars 1945, dans un camp d'Autriche.
Depuis son départ du fort du Hâ, en août 1943, pour Fresnes et Compiègne, on était sans nouvelles de lui.
Pour moi qui ai vécu 50 jours à ses côtés, dans cette cellule 4, avec une dizaine de codétenus, qu'il me soit permis, au nom de tous,
de rendre, ici, hommage à sa mémoire.
Nous étions une dizaine entassés dans cette cellule 4 (6 m²). Air putréfié, abjecte nourriture, abominable hygiène, continuelles
tracasseries de nos gardes-chiourmes dont le "Face au mour" nous faisait trembler.
Les autres numéros n'étaient pas mieux favorisés. Le n°1, infecte trou noir et sans air, a renfermé jusqu'à 20 juifs, véritables
squelettes, ne sortant jamais.
Longues journées de souffrances physiques et d'abandon moral, agrémentées, heureusement pour nous, par cet appel "Paul! Paul!" qui
nous apportait un peu de joie et d'espoir. "Paul! Paul!" on appelait de la cour des détenus du fort du Hâ français. Un pain garni
qui tombait dans la hotte, partagé entre dix - quelques cigarettes - des lettres qui nous arrivent,... Les réponses griffonnées en
hâte (nous n'avons qu'un bout de crayon pour dix) - sur un bout de papier quelconque, s"envolent par la même voie. "Paul! Paul!" on
appelle du 1er et du 2ème étage. - C'est Bébert, du 5, un type du milieu, revu et souvent sauvé, quand Paul
était chef de la sûreté. Celui-ci avait trouvé un moyen de communication plus sûr: un trou creusé mystérieusement dans le mur, donnait
passage à un petit tube qui circulait du 2 au 7.
Que de services n'a-t-il aps rendu à ses compagnons de misère, malgré ses souffrances personnelles, car, dès son premier interrogatoire
dans les lieux de flagellation du Bouscat, il se savait à la merci de ses accusateurs et bourreaux. Néanmoins, il avait toujours un
mot de réconfort pour les uns et les autres.
Je me rappelle encore, après deux ans, de ses encouragements à un jeune étudiant accusé d'avoir photographié, de Blanquefort, dans
un petit appareil 6 1/2 x 9, une vue de Bordeaux, survolée par des ballonnets!!!, à un honorable commerçant d'Orthez, coupable d'être
le père de son fils accusé, sans preuve aucune, d'avoir favorisé le passage en Espagne, et à moi-même, incarcéré pendant 50 jours,
carte rouge, (c'est à dire candidat pour otage ou le transport en Allemagne). Je n'ai jamais su pourquoi.
Qu'il me soit permis, au nom de tous ceux de la cellule 4, d'offrir ici à Monsieur Raymond mamert et à sa famille, (l'hommage de
notre profonde sympathie et de nos sincères condoléances. Unissant le souvenir de Paul à celui de tous ces vaillants martyrs tombés
sous la barbarie nazie, nous garderons pieusement leur mémoire. Que leurs cendres dispersées sur tous les coins de l'Allemagne soient
le germe de la grandeur de la France, relevée de ses ruines par un renouveau de vraie liberté, de parfaite égalité et d'une généreuse
fraternité.
Ceux du 4. |