en partance sur Buchenwald. Le cours du voyage, pour nous, s’est mal passé… parce que deux gars ont essayé
de s’évader du train. Vous savez… les wagons à bestiaux ont des petites lucarnes pour aérer les bêtes que l’on mettait à l’intérieur
et deux gars ont réussi à forcer une de ces lucarnes et de partir. On a entendu des coups de feu.
Résultat de la manœuvre, c’est qu’au premier arrêt la lucarne a été complètement bouchée, clouée avec planches et qu’on n’a plus
ouvert la porte jusqu’à l’arrivée à Buchenwald. On est arrivé, là-bas, le 10. Le temps du voyage… cinq jours. Le 10 au matin, on
est arrivés à Buchenwald. Ni nourriture, ni eau, rien… On était… on était pas nombreux. Certains wagons étaient à 120. On était à
90 seulement… dont un garçon qui était blessé; il avait les deux jambes dans le plâtre. Je crois qu’il était de Lons-le-Saunier ou
de... je sais qu’il était du Jura.
On est donc arrivés à Buchenwald. Buchenwald aller sur la place d’appel. Déshabillage. Rasage. On est donc passé à l’immatriculation.
Nous ne savions pas ce qui nous attendait en ces lieux. On ne savait pas. On ne savait absolument pas où l’on allait. Si on allait
être mis dans des camps de prisonniers… dans des camps de… on est arrivé dans ce camp immense… de nombreux réseaux de barbelés… je
crois même qu’il y avait… vu de l’intérieur
du camp, un immense réseau de barbelés… avec des lampadaires disséminés tout
autour. Ensuite des réseaux de barbelés beaucoup plus petits, des champs de
mines, ensuite des réseaux de barbelés électrifiés. Donc, pour sortir…
De ma connaissance à moi, j’ai connu une personne qui s’est évadée mais pas du camp même. Il était dans le camp et c’est en sortant
faire des travaux qu’il a réussi à s’évader le pauvre malheureux, il n’a pas eu de chance puisqu’il a été repris et il a été ramené
au camp, dans le baraquement. C’est un des rares cas que j’ai connu personnellement. Les autres… il y a eu d’autres évadés…
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De là, on a été transféré, donc immatriculé. J’ai le 85126 et mon père le 85128. Entre nous il y a eu une
autre personne qui n’avait rien à voir, que je ne connais pas… parce qu’on a fait des recherches… on ne sait pas qui c’est, il
n’était pas de notre groupe… pourquoi est-il entre nous deux ? On ne sait pas.
On a donc été transféré vers ce que l’on appelait le « petit camp ». le « petit camp » c’était… comment
vais-je vous dire cela ? Des rayonnages avec trois étages l’un sur l’autre où l’on était empilés les uns sur les autres
pour se coucher. Mais, on a eu de la chance, parce que normalement c’était une quarantaine, à l’époque, qui devait durer quarante
jours et nous, je crois, qu’on est resté une huitaine de jours, à peu près.
On montait au « grand camp ». De là, mon père, et toute une bande également, a été transférés sur le camp de Langestein.
Langestein qui était une ville… Monsieur Leroyer, qui a été prisonnier dans ce camp, a fait des tas d’écrits sur ce camp qui, donc,
connaît beaucoup plus de choses que moi. Moi, j’ai été malade. J’ai été mis à l’infirmerie, ce que l’on appelle le « revier ».
Je suis resté deux ou trois jours là. Quand je suis sorti, on m’a affecté à la sablière, carrière de pierre, donc, le matin, j’allais
au travail. La carrière de pierre, pour nous consistait… il y avait des ouvriers qui sortaient des rochers de la carrière. Nous, on
transportait ce rocher dans
une espèce de concasseur. C’était à celui… il ne fallait pas se faire
prendre. Alors on essayait de transporter les moins lourds… les pavés les
moins lourds. Et, dans mon malheur, je peux dire que… il y a toujours des
côtés « chance » dans le malheur… je peux dire que je me suis écroulé de
faiblesse. On m’a donc transporté dans une baraque qu’il y avait là, où il y
avait des tailleurs de pierres qui faisaient des monuments funéraires. Une
baraque… Pour expliquer un peu la carrière, c’était au fond d’un ravin, si
l’on peut dire… Çà rappellerait, en plus petit, ce fameux camp où des gens
marchaient et descendaient dans une carrière. Je ne sais plus… depuis le
temps… çà m’échappe… j’ai des camarades qui ont été là-bas… je crois que
c’était en Tchécoslovaquie… Çà rappelle un peu çà, mais en plus petit, parce
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